Je transforme la laine d’une race ancienne et je la file au rouet pour fabriquer des chaussons pour une exposition sur les échassiers.
Pour fabriquer les chaussons des échassiers pour l’exposition, j’ai utilisé les méthodes d’époque pour être au plus près du travail ancestral.
Les premières échasses sont apparues bien avant la forêt. En ce temps là, les Landes étaient un immense pays marécageux, très plat, où la végétation était essentiellement constituée d’herbes et de broussailles. Pour se déplacer, les gens ont longtemps utilisé les échasses qui leur permettaient de faire des kilomètres en allant bien plus vite que la marche à pied. En effet, le vélo n’existait pas et tout le monde n’avait pas un cheval pour y atteler une charette.
Les bergers ont utilisé ce moyen de transport car il leur permettait d’avoir un meilleure vue sur le troupeau ainsi que de voir arriver un éventuel danger. Tout au long de la journée, ils transformaient la laine de leur mouton grâce au fuseau qu’ils avaient avec eux.
La laine que l’on m’a donnée provient d’une ferme du Conservatoire des Races d’Aquitaine. C’était un challenge avec moi-même et j’ai adoré faire ce travail.
La laine de la race de mouton landais est une laine assez douce avec de longs poils et un sous-poil très court.
Trier et laver la laine
Avant de transformer la laine, j’ai d’abord trié la toison pour en retirer un maximum de crotte et de paille.
Pour cela, j’ai étalé la toison sur la table et tout ce qui est crotté ou très sale, est jeté au compost.
Je l’ai ensuite lavée à la main en plusieurs bains par petites quantités. C’est une laine qui n’est pas très grasse en comparaison avec la Suffolk que j’ai l’habitude de travailler.
Avec un seau de laine sale, j’obtiens un saladier de taille moyenne de laine mouillée. C’est dire qu’elle a du gonflant même sale. Je l’essore dans l’essoreuse à salade en trois passages pour lui retirer le maximum d’eau et lui permettre de retrouver son gonflant. Elle sèche ensuite au soleil sur une serviette éponge.
Une fois sèche, le chat aime bien s’y coucher. C’est un bon indicateur de séchage.
Le cardage ? qu’es acò ?
La cardeuse à balancier ou cardeuse à matelas
J’ai passé la laine lavée à la cardeuse à balancier pour l’écharpiller. (écharpiller la laine, c’est diviser la laine et lui sortir les nœuds en l’aérant)
La cardeuse à balancier comme son nom l’indique possède un balancier.
C’est un banc équipé d’un balancier sur lequel sont fixés de gros clous. La laine passant à travers les clous inclinés dans plusieurs sens avance sur le plateau jusqu’à tomber par terre en un nuage vaporeux. Ceci permet de défaire les nœuds éventuels qui se sont fait durant le lavage. Ca permet de sortir une grande partie la paille et déchets restants.
Les cardes à main
En temps ordinaire, j’ai l’habitude de peigner la laine avec ma cardeuse à rouleaux. Je possède 3 rouleaux avec des écartements différents en fonction de la laine que je carde.
Avant de la filer j’ai voulu respecter les méthodes ancestrales et pour ce travail, j’ai préféré utiliser les cardes à mains pour être dans l’authentique.
Les cardes servent à mettre toutes les fibres dans le même sens. Les cardes à mains vont par deux. Chaque carde est équipée d’une partie plate sur lesquels de petits clous fins et rapprochés forment un tapis, et d’un manche pour l’avoir bien en main..
Pour utiliser les cardes en main, on pose la laine en l’étirant sur une carde. Ensuite avec la deuxième, on vient brosser la laine pour étirer la laine. Les cardes à main ressemblent aux brosses pour chien mais en plus grand. C’est un travail long et qui demande de la force. Cette méthode permet de peigner la laine et de mettre toutes les fibres dans le même sens.
Filer la laine avec un rouet
J’ai ensuite commencé à filer cette laine au rouet.
J’en possède plusieurs. Celui que j’ai utilisé, a été fabriqué par un menuisier du Médoc pour une commande par une personne qui n’est pas venu le chercher. Après l’avoir essayé j’en ai fait l’acquisition et je lui ai commandé deux bobines supplémentaires. Nous verrons plus tard pourquoi.
La laine du mouton landais est composée de fibres longues (les jarres) et de fibres très courtes dans le sous-poil.
Le filage des fibres longues est facile mais il faut faire attention à y aller doucement très régulièrement pour que les fibres courtes ne vous lâchent pas et s’insèrent dans le fil.
Parlons technique
Filer un premier fil
Pour faire un fil à tricoter, il faut 2 ou 3 brins. Chaque brin se file séparement.
Pour le premier fil, j’y ai passé presque 3 heures en cardant au fur à mesure la laine dont j’avais besoin. Pour démarrer un fil, je fixe un fil de laine déjà filé attaché à la bobine dans une encoche. Ce fil passe à travers le trou de l’épinglier (voir la photo) et j’y accroche la laine que je vais vouloir filer.
En pédalant, je fais tourner la roue qui fait tourner l’épinglier grace à la courroie. La laine vrille et se transforme en fil. C’est le changement dans la tension du fil qui l’entraîne sur la bobine.
Filer un deuxieme fil
Pour faire le second fil, j’ai donc eu besoin d’une deuxième bobine. J’ai mis moins de temps pour faire ce fil car j’avais pris le coup de main avec cette laine. Chaque pelote ainsi filée s’appelle un fil célibataire. Les fils célibataires se filent dans le même sens de rotation.
Le retord
Pour le fil définitif, il faut réunir les deux fils célibataires pour faire ce que l’on appelle le retord. C’est ce fil qui sera le fil à tricoter. J’ai fait la pelote avec deux fils célibataires car je ne sais pas si autrefois les bergers utilisaient deux ou trois fils peut-être plus pour faire leur pelote.
Pour faire cette laine à tricoter, la bobine doit tourner en sens inverse. Il faut amener la laine régulièrement pour avoir un fil le plus régulier possible à moins de vouloir obtenir un fil décoratif. Mais ce n’est pas ce que je voulais.
La laine a été filée au rouet alors que les bergers filaient aux fuseaux du haut de leurs échasses.
J’ai filé 2 pelotes ainsi qu’un fil célibataire. Les pelotes mesurent environ 110 m et pèsent chacune 75 grammes.
Mon travail en exposition
Mon travail de transformation de la laine sera visible à l’exposition qui aura lieu du 20 juillet au 1er août à la salle l’escourre de Lacanau Océan. » Des Échasses de la lande de La Canau, pour quoi faire ?
J’ai donné des échantillons de mon travail au fur à mesure des étapes (lavage feutrage cardage) afin que le visiteur puisse apprécier les étapes de transformation.
De nouvelles créations à venir
Avec la laine cardée, j’ai fait un test de feutrage en fabriquant un petit béret qui sera visible lors de l’exposition. La laine se feutre assez bien et elle est très douce. Comme elle est très jarreuse, elle a tendance à s’entortiller dans les doigts mais le résultat final est très agréable.
La laine n’est pas blanche. Elle est plutôt grise à certains endroits. Personnellement je la trouve très belle.
Je prévois d’utiliser cette laine dans mes créations car j’aime son côté authentique, traditionnel et rare.
Déjà un premier béret est fabriqué à retrouver dans la boutique.
Bonjour, je suis originaire de la Chalosse , j’habite dans le NORD , en proche banlieue de LILLE
je suis venu sur ce site car je m’informais sur les Arts Créatifs. J’ai lu votre article sur le traitement de la laine . Votre nom CAUHAPE , me rappelle les Landes et les Pyrénées Atlantiques., régions où ce nom est courant , en nom de famille et en nom de maison.
Quelles sont vos origines ? quel est votre parcours ?
Merci , bonne soirée . Respectueusement .
Jean de Chalosse
Le nom de Cauhapé est béarnais qui est le nom de mon mari originaire de la vallée d’Aspe.
Je suis née à Bordeaux et je vis en Gironde depuis toujours.
Je suis une passionnée de la tradition faisant partie de groupes de musique et danses traditionnelles sur le Bassin d’Arcachon.